3– La technique et la confection
La
confection longue et minutieuse de ces tissus était exclusivement réservée
aux femmes, généralement aux « anciennes » du village
pour leur disponibilité.
L’exécution de ce travail prenait son ampleur pendant la saison
des pluies, car à cette période, on s’adonnait moins aux
travaux champêtres, et lors des funérailles qui pouvaient durer
deux à trois mois.
D’emblée, il faut avouer que la confection de ce tissu à
été effective en raison de la profusion de matière végétale
qui est le raphia dans cette région. On ne saurait donc parler de la
technique de confection sans connaître le raphia.
« Le raphia ou raphia ruffia de son nom scientifique appartient à
la famille des monocotylédones. Il fait parti de l’ordre des
palmales, arbre avec feuilles à nervures pennées ou palmées
se déchirant au niveau des nervures secondaires. »
« Le raphia prolifère surtout dans les régions équatoriales
mais il est aussi pan tropical ou subtropical ; la forêt intertropicale
en arbitre la majeur partie mais il peuple aussi les berges des rivières.
Son aire de dispersion n’est pas limitée. »
Pour ce qui est de sa constitution, le tronc ramifié du raphia s’appelle
un stipe. Les feuilles sont caractéristiques ; elles sont attachées
en hélice sur le stipe qui est recouvert de cicatrices laissées
par elles.
En général, les feuilles forment un bouquet au sommet. Elles
sont très grandes, leur limbe atteint souvent quinze mètre et
comportent un long pétiole formant une graine à la base.
« A l’origine, le limbe est entier, plissé le long des
nervures, il se déchire par la suite le long des plis. La feuille est
finalement pennée, elle vit plusieurs années. »
C’est essentiellement du limbe d’origine qu’on tire les
fibres servant à confectionner le tissu en raison de leur malléabilité.
La confection du tissu s’effectue en trois étapes.
- l’extraction des fibres
- le tressage ou « tissage manuel »
- la teinture et la ligature
-
* L’extraction des fibres
Les fibres sont extraites des feuilles provenant d’un jeune limbe nouvellement
sectionné.
Elles sont obtenues par une technique qui consiste à faire une légère
cassure à l’origine de la feuille et à tirer soigneusement
à partir de cette partie cassée jusqu’au bout de sorte
à obtenir de petites fibres.
Ces fibres ainsi obtenues sont finement choisies, épurées eu
égard à leur résistance aux efforts qu’elles auront
à subir afin d’éviter une éventuelle cassure. Celles-ci
sont utilisées pour la confection d’un « métier
» rudimentaire et manuel qui imite dans quelque manière le métier
à tisser traditionnel.
*
Le tressage ou « tissage manuel »
Les fibres une fois obtenues, on passe à l’ourdissage qui consiste
à réunir en nappe un nombre de fils donnés.
Les fils ainsi groupés se nomment « foudé » en Dida.
Cette nappe de fibres parallèles est attachée soigneusement
à un tronc de bois ou au gros orteil selon le désir de la tisseuse.
On effectue ensuite le « rentrage », cette opération tient
du passage individuel et dans un ordre bien déterminé de certaines
fibres « foudé » dans les maillons correspondant dans les
« lisses » du « harnais » constituées avec
des fibres de raphia.
Les fibres du « foudé » sont divisées en deux groupe
devant évoluer de la même façon. Le même groupe
avec tous ses fibres rentrent sur une même lame (ensemble de lisse).
Le problème de commande de ces fibres revient à la commande
dite des lames. La commande est réalisée par une mécanique
dite « ratière » ; ici, cette mécanique est manuelle
; chaque lame est activée par la main servant de levier et capable
de la faire descendre. Il est nécessaire de noter que les fibres de
la lame font aussi partie du « foudé » rattaché
à l’orteil ou au tronc en bois, mais elles sont dégagées
de la nappe parallèle précitée. Le travail de la filature
ne se fait pas ici avec une navette mais à la main ; un mouvement unilatéral
s’effectue en faisant véhiculer les fibres de la trame à
travers la « foule » formée par l’entrebâillement
des nappes de fibres de la chaîne.
A chaque passage de la trame, on utilise un peigne fait d’écale
de noix de coco « yancoco » pour tasser les fibres. La grande
pièce « assia » est confectionnée par l’utilisation
de plusieurs « foudé » selon la même technique. Le
tissu ainsi obtenu est un tube de 50 à 80 cm pour la grande pièce.
*
La teinture et la ligature
Ici on utilise la technique des réserves nouées et la teinture
est faite à base de colorant naturels. Mais avant d’effectuer
les ligatures, on procède à une première teinture.
En effet, on aborde la teinture avec de la couleur jaune obtenu avec une décoction
de liane « louloukpo » appelée « zalo » ; la
durée normale d’immersion est de trente minutes mais elle peut
traîner plusieurs jours et on peut aussi procéder à plusieurs
bains successifs, avec un intervalle de séchage d’un jour entre
les différents bains. Le jaune sert ici de couleur de fond.
Après séchage teinture on procède aux ligatures. L’obtention
des différents motifs est relative à la façon dont est
liée l’étoffe.
Le terme réserve vient donc de la partie du tissu protégé
par les ligatures du fil qui échappe à la teinture. Un tracé
s’effectue préalablement avec du jus de kola « golignou
». Le tissu est ensuite plié en accordéon selon que l’on
veut réaliser un motif ovale « diagbalé » dans le
sens de la longueur ou de la largeur, les plis étant retenus par des
points serrés. L’orientation et la largeur des plis varient selon
ce que l’on veut obtenir. Les points et les carrés sont obtenus
par des ligatures serrées autour du tissu pincé et plié.
Le nombre de ligatures correspond aux nombres de carrés « kobi
» que l’on veut voir apparaître, le nombre de plissages
et pinçages au nombre de motifs « ciotchouo ». Pour obtenir
des points ou de très petits cercles, on noue le tissu autour de graines
ou de petits cailloux. La variété des traces laissées
par les bains de teinture dépendra du serrage, de la largueur et de
l’emplacement des nouages, de la régularité des plis.
Le second bain intervient un fois le tissu préparé (noué)
; il se fait avec une décoction de couleur rouge issue de l’écorce
d’un arbre nommé « guidrèyè ». A cette
étape d’autres attaches peuvent êtres ajoutées pur
compléter la composition. Le dernier bain se fait dans une boue spéciale
« kpoukpo » et permet d’obtenir le noir. Cette étape
peut aussi nécessiter des attaches selon le jeu de couleurs qu’on
veut avoir.
Après l’étape de la teinture on plonge le tissu dans une
solution de potasse pour la fixation des couleurs et dans de l’eau tiède
pour le détendre. Il se présente sous un aspect gaufré.